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vermeil, qui avec cela ſe ſouvient de quelques diſtinctions métaphyſiques, explique ce que c’eſt que la lumière de gloire, & ſçait préciſément comment l’on voit Dieu, cela s’appelle un docteur. Une perſonne humble, qui eſt enſevelie dans le cabinet, qui a médité, cherché, conſulté, confronté, lu ou écrit pendant toute ſa vie, eſt un homme docte.

29. — Chez nous le ſoldat eſt brave, & l’homme de robe eſt ſavant, nous n’allons pas plus loin. Chez les Romains l’homme de robe étoit brave, & le ſoldat étoit ſavant : un Romain étoit tout enſemble & le ſoldat & l’homme de robe.

30. — Il ſemble que le héros eſt d’un ſeul métier, qui eſt celuy de la guerre, & que le grand homme eſt de tous les métiers, ou de la robe, ou de l’épée, ou du cabinet, ou de la cour : l’un & l’autre mis enſemble ne pèſent pas un homme de bien.

31. — Dans la guerre, la diſtinction entre le héros & le grand homme eſt délicate : toutes les vertus militaires font l’un & l’autre. Il ſemble néanmoins que le premier ſoyt jeune, entreprenant, d’une haute valeur, ferme dans les périls, intrépide ; que l’autre excelle par un grand ſens, par une vaſte prévoyance, par une haute capacité, & par une longue expérience. Peut-eſtre qu’ALEXANDRE Il étoit qu’un héros, & que CÉSAR étoit un grand homme.

32. — Æmile étoit né ce que les plus grands hommes ne deviennent qu’à force de règles, de méditation & d’exercice. Il n’a eu dans ſes premières années qu’à remplir des talents qui étaient naturels, & qu’à ſe livrer à ſon génie. Il a fait, il a agi, avant que de ſavoir, ou plutoſt il a ſu ce qu’il n’avoit jamais appris. Dirai-je que les jeux de ſon enfance ont été pluſieurs victoires ? Une