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en avez.

22. — Il apparaît de temps en temps ſur la ſurface de la terre des hommes rares, exquis, qui brillent par leur vertu, & dont les qualitez éminentes jettent un éclat prodigieux. Semblables à ces étoiles extraordinaires dont on ignore les cauſes, & dont on ſçait encore moins ce qu’elles deviennent après avoir diſparu ils n’ont ni aïeuls, ni deſcendants : ils compoſent ſeuls toute leur race.

23. — Le bon eſprit nous découvre noſtre devoir, noſtre engagement à le faire, & s’il y a du péril, avec péril : il inſpire le courage, ou il y ſupplée.

24. — Quand on excelle dans ſon art, & qu’on luy donne toute la perfection dont il eſt capable l’on en ſort en quelque manière, & l’on s’égale à ce qu’il y a de plus noble & de plus relevé. V** eſt un peintre C** un muſicyen, & l’auteur de Pyrame eſt un poète ; mais MIGNARD eſt MIGNARD, LULLI eſt LULLI, & CORNEILLE eſt Corneille.

25. — Un homme libre, & qui n’a point de femme s’il a quelque eſprit, peut s’élever au-deſſus de ſa fortune, ſe meſler dans le monde, & aller de pair avec les plus honneſtes gens. Cela eſt moins facile à celuy qui eſt engagé : il ſemble que le mariage met tout le monde dans ſon ordre.

26. — Après le mérite perſonnel, il faut l’avouer, ce ſont les éminentes dignitez & les grands titres dont les hommes tirent plus de diſtinction & plus d’éclat ; & qui ne ſçait eſtre un ÉRASME doit penſer à eſtre éveſque. Quelques-uns, pour étendre leur renommée, entaſſent ſur leurs perſonnes des pairies, des colliers d’ordre des primaties, la pourpre, & ils auraient beſoin d’une tiare ; mais quel beſoin a Trophime d’eſtre cardinal ?

27. — L’or é