Page:La Bruyère - Les Caractères, Michallet, 1688.djvu/142

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contente de coucher indifféremment avec les autres sur de la natte qu’il emprunte de son Pilote. Vous verrez une autre fois cet homme sordide acheter en plein marché des viandes cuites, toutes sortes d’herbes, et les porter hardiment dans son sein et sous sa robe : s’il l’a un jour envoyée chez le Teinturier pour la détacher, comme il n’en a pas une seconde pour sortir, il est obligé de garder la chambre. Il sait éviter dans la place la rencontre d’un ami pauvre qui pourrait lui demander[1] comme aux autres, quelque secours ; Il se détourne de lui, et reprend le chemin de sa maison. Il ne donne point de servantes à sa femme, content de lui en louer quelques unes pour l’accompagner à la ville toutes les fois qu’elle sort. Enfin ne pensez pas que ce soit un autre que lui

  1. Par forme de contribution. Voyez les chapitres de la dissimulation et de l’esprit chagrin.