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La science des détails, ou une diligente attention aux moindres besoins de la république, est une partie essentielle au bon gouvernement, trop négligée à la vérité dans les derniers temps par les rois ou par les ministres, mais qu’on ne peut trop souhaiter dans le souverain qui l’ignore, ni assez estimer dans celui qui la possède. Que sert en effet au bien des peuples et à la douceur de leurs jours, que le prince place les bornes de son empire au delà des terres de ses ennemis, qu’il fasse de leurs souverainetés des provinces de son royaume ; qu’il leur soit également supérieur par les sièges et par les batailles, et qu’ils ne soient devant lui en sûreté ni dans les plaines ni dans les plus forts bastions ; que les nations s’appellent les unes les autres, se liguent ensemble pour se défendre et pour l’arrêter ; qu’elles se liguent en vain, qu’il marche toujours et qu’il triomphe toujours ; que leurs dernières espérances soient tombées par le raffermissement d’une santé qui donnera au monarque le plaisir de voir les princes ses petits-fils soutenir ou accroître ses destinées, se mettre en campagne, s’emparer de redoutables forteresses, et conquérir de nouveaux Etats ; commander de vieux et expérimentés capitaines, moins par leur rang et leur naissance que