dont les moindres esprits se trouvent capables, mais à me dire de ces injures grossières et personnelles, si difficiles à rencontrer, si pénibles à prononcer ou à écrire, surtout à des gens à qui je veux croire qu’il reste encore quelque pudeur et quelque soin de leur réputation.
Et en vérité je ne doute point que le public ne soit enfin étourdi et fatigué d’entendre, depuis quelques années, de vieux corbeaux croasser autour de ceux qui, d’un vol libre et d’une plume légère, se sont élevés à quelque gloire par leurs écrits. Ces oiseaux lugubres semblent, par leurs cris continuels, leur vouloir imputer le décri universel où tombe nécessairement tout ce qu’ils exposent au grand jour de l’impression : comme si on était cause qu’ils manquent de force et d’haleine, ou qu’on dût être responsable de cette médiocrité répandue sur leurs ouvrages. S’il s’imprime un livre de mœurs assez maldigéré pour tomber de soi-même et ne pas exciter leur jalousie, ils le louent volontiers, et plus volontiers encore ils n’en parlent point ; mais s’il est tel que le monde en parle, ils l’attaquent avec furie. Prose, vers, tout est sujet à leur censure, tout est en proie à une haine implacable, qu’ils ont conçue contre ce qui ose paraître dans quelque perfection, et avec les signes d’une approbation publique. On ne sait plus quelle morale leur fournir qui leur agrée : il faudra leur rendre celle de la