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proverbiales usées depuis si longtemps, pour avoir servi à un nombre infini de pareils discours depuis la naissance de l’Académie française. M’était-il donc si difficile de faire entrer Rome et Athènes, le Lycée et le Portique, dans l’éloge de cette savante compagnie ? Etre au comble de ses vœux de se voir académicien ; protester que ce jour où l’on jouit pour la première fois d’un si rare bonheur est le jour le plus beau de sa vie ; douter si cet honneur qu’on vient de recevoir est une chose vraie ou qu’on ait songée ; espérer de puiser désormais à la source les plus pures eaux de l’éloquence française ; n’avoir accepté, n’avoir désiré une telle place que pour profiter des lumières de tant de personnes si éclairées ; promettre que tout indigne de leur choix qu’on se reconnaît, on s’efforcera de s’en rendre digne : cent autres formules de pareils compliments sont-elles si rares et si peu connues que je n’eusse pu les trouver, les placer, et en mériter des applaudissements ?

Parce donc que j’ai cru que, quoi que l’envie et l’injustice publient de l’Académie française, quoi qu’elles veuillent dire de son âge d’or et de sa décadence, elle n’a jamais, depuis son établissement, rassemblé un si grand nombre de personnages illustres pour toutes sortes de talents et en tout genre d’érudition, qu’il est facile aujourd’hui d’y en remarquer ;