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cessité plus que morale qu’il le soit ; qu’à la vérité son père a pu déroger ou par la charrue ou par la houe, ou par la malle, ou par les livrées ; mais qu’il ne s’agit pour lui que de rentrer dans les premiers droits de ses ancêtres, et de continuer les armes de sa maison, les mêmes pourtant qu’il a fabriquées, et tout autres que celles de sa vaisselle d’étain ; qu’en un mot les lettres de noblesse ne lui conviennent plus ; qu’elles n’honorent que le roturier, c’est-à-dire celui qui cherche encore le secret de devenir riche.

4 (IV) Un homme du peuple, à force d’assurer qu’il a vu un prodige, se persuade faussement qu’il a vu un prodige. Celui qui continue de cacher son âge pense enfin lui-même être aussi jeune qu’il veut le faire croire aux autres. De même le roturier qui dit par habitude qu’il tire son origine de quelque ancien baron ou de quelque châtelain, dont il est vrai qu’il ne descend pas, a le plaisir de croire qu’il en descend.

5 (IV)

Quelle est la roture un peu heureuse et établie à qui il manque des armes, et dans ces armes une pièce honorable, des suppôts, un cimier, une devise, et peut-être le cri de guerre ? Qu’est devenue la distinction des casques et des heaumes ? Le nom et l’usage en sont abolis ; il ne s’agit plus de les