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ou une forte pension, qui n’assure par vanité, ou pour marquer son désintéressement, qu’il est bien moins content du don que de la manière dont il lui a été fait. Ce qu’il y a en cela de sûr et d’indubitable, c’est qu’il le dit ainsi.

C’est rusticité que de donner de mauvaise grâce : le plus fort et le plus pénible est de donner ; que coûte-t-il d’y ajouter un sourire ?

Il faut avouer néanmoins qu’il s’est trouvé des hommes qui refusaient plus honnêtement que d’autres ne savaient donner ; qu’on a dit de quelques-uns qu’ils se faisaient si longtemps prier, qu’ils donnaient si sèchement, et chargeaient une grâce qu’on leur arrachait de conditions si désagréables, qu’une plus grande grâce était d’obtenir d’eux d’être dispensés de rien recevoir.


46 (IV)


L’on remarque dans les cours des hommes avides qui se revêtent de toutes les conditions pour en avoir les avantages : gouvernement, charge, bénéfice, tout leur convient ; ils se sont si bien ajustés, que par leur état ils deviennent capables de toutes les grâces ; ils sont amphibies, ils vivent de l’Eglise et de l’épée, et auront le secret d’y joindre la robe. Si vous demandez : « Que font ces