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et de l’intérêt. Les hommes veulent être esclaves quelque part, et puiser là de quoi dominer ailleurs. Il semble qu’on livre en gros aux premiers de la cour l’air de hauteur, de fierté et de commandement, afin qu’ils le distribuent en détail dans les provinces : ils font précisément comme on leur fait, vrais singes de la royauté.


I3 (I)


Il n’y a rien qui enlaidisse certains courtisans comme la présence du prince : à peine les puis-je reconnaître à leurs visages ; leurs traits sont altérés, et leur contenance est avilie. Les gens fiers et superbes sont les plus défaits, car ils perdent plus du leur ; celui qui est honnête et modeste s’y soutient mieux : il n’a rien à réformer.


I4 (I)


L’air de cour est contagieux : il se prend à V**, comme l’accent normand à Rouen ou à Falaise ; on l’entrevoit en des fourriers, en de petits contrôleurs, et en des chefs de fruiterie : l’on peut avec une portée d’esprit fort médiocre y faire de grands progrès. Un homme d’un génie élevé et d’un