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avec nous de société et de bienveillance, qui nous aime, qui nous goûte, qui nous fait mille offres de services et qui nous sert quelquefois, qui n’ait en soi, par l’attachement à son intérêt, des dispositions très proches à rompre avec nous, et à devenir notre ennemi.


60 (I)


Pendant qu’Oronte augmente, avec ses années, son fonds et ses revenus, une fille naît dans quelque famille, s’élève, croît, s’embellit, et entre dans sa seizième année. Il se fait prier à cinquante ans pour l’épouser, jeune, belle, spirituelle : cet homme sans naissance, sans esprit et sans le moindre mérite, est préféré à tous ses rivaux.


6I


(I) Le mariage, qui devrait être à l’homme une source de tous les biens, lui est souvent, par la disposition de sa fortune, un lourd fardeau sous lequel il succombe : c’est alors qu’une femme et des enfants sont une violente tentation à la fraude, au mensonge et aux gains illicites ; il se trouve entre la friponnerie et l’indigence : étrange situation !

(IV) Epouser une veuve, en bon français, signifie faire sa fortune ; il n’opère pas toujours ce qu’il signifie.


62 (IV)


Celui qui n’a de partage avec ses frères que pour vivre à l’aise bon praticien, veut être officier ; le simple officier se fait magistrat, et le magistrat veut présider ; et ainsi de toutes les conditions, où les hommes languissent serrés et indigents,