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reçue, et à toutes les heures ; on l’embrasse à plusieurs reprises ; on croit l’aimer ; on lui parle à l’oreille dans un cabinet où elles sont seules ; on a soi-même plus de deux oreilles pour l’écouter ; on se plaint à elle de tout autre que d’elle ; on lui dit toutes choses, et on ne lui apprend rien : elle a la confiance de tous les deux. L’on voit Glycère en partie carrée au bal, au théâtre dans les jardins publics, sur le chemin de Venouze, où l’on mange les premiers fruits ; quelquefois seule en litière sur la route du grand faubourg, où elle a un verger délicieux, ou à la porte de Canidie, qui a de si beaux secrets, qui promet aux jeunes femmes de secondes noces, qui en dit le temps et les circonstances. Elle paraît ordinairement avec une coiffure plate et négligée, en simple déshabillé, sans corps et avec des mules : elle est belle en cet équipage, et il ne lui manque que de la fraîcheur. On remarque néanmoins sur elle une riche attache, qu’elle dérobe avec soin aux yeux de son mari. Elle le flatte, elle le caresse ; elle invente tous les jours pour lui de nouveaux noms ; elle n’a pas d’autre lit que celui de ce cher époux, et elle