Page:La Bruyère - Œuvres complètes, édition 1872, tome 1.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée



Qui peut, avec les plus rares talents et le plus excellent mérite, n’être pas convaincu de son inutilité, quand il considère qu’il laisse en mourant un monde qui ne se sent pas de sa perte, et où tant de gens se trouvent pour le remplacer ?


2 (I)


De bien des gens il n’y a que le nom qui vale quelque chose. Quand vous les voyez de fort près, c’est moins que rien ; de loin, ils imposent.


3


(VI) Tout persuadé que je suis que ceux que l’on choisit pour de différents emplois, chacun selon son génie et sa profession, font bien, je me hasarde de dire qu’il se peut faire qu’il y ait au monde plusieurs personnes, connues ou inconnues, que l’on n’emploie pas, qui feraient très bien ; et je suis induit à ce sentiment par le merveilleux succès de certaines gens que le hasard seul a placés, et de qui jusques alors on n’avait pas attendu de fort grandes choses.

(I) Combien d’hommes admirables, et qui avaient de très beaux génies, sont morts sans qu’on en ait