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en tout point ; & si je ne me trouvais réduit… mais le commerce, mon cher Dominique, est semblable à une mer tantôt calme & tout à-coup orageuse. Les mêmes vents qui font vôler votre vaisseau, l’engloutissent. J’ai fait naufrage sous un ciel qui paraissait serein. C’est à vous de faire entendre raison à votre fils ; il a l’esprit juste, il sentira, de lui-même, combien le sort est contraire à ses vœux.

Dominique pere.

Me donnez-vous votre parole que, s’il n’y avait point d’autres obstacles, votre fille serait à lui ?

M. Delomer.

Oh ! de bon cœur… puisse-t-il acquérir tout le bien que je lui souhaite ; mais, s’il faut vous le dire, pour un homme de probité cela devient plus difficile que jamais.

Dominique pere, regardant son baril.

Allons, mon baril, allons, parle pour moi… Vil argent ! c’est donc à toi & non au mérite personnel qu’il faut devoir le bonheur de mon fils ! J’ai bien fait d’y penser : (Reprenant la main à M. Delomer.) touchez là, c’est une affaire faite.

M. Delomer.

Vous perdez l’esprit !

Dominique pere.

Voyez, voyez seulement ce qui est là dessus ma brouette.