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M. Delomer.

Mais s’il me prenait fantaisie de ne pas vous donner de l’argent ?

Dominique pere.

Vous seriez comme bien d’autres ; car on ne paye plus.

M. Delomer.

Comment ! Vous auriez beaucoup de débiteurs, vous ?

Dominique pere.

Ma foi ! il n’y a plus guéres que cinq ou six de mes pratiques & des plus anciennes qui me donnent là, sans faire la mine, de l’argent, quand je leur en demande : les autres, petits ou grands, prennent des remises ; & j’ai là une liste, voyez vous ! où il y a bien des verreux.

M. Delomer, haussant les épaules.

Mais, comment peut-on demander crédit à un Vinaigrier ? cela me révolte. (Il le paie.)

Dominique pere.

Vraiment, vraiment ! celà vous étonne, eh ! eh ! Si je voulais leur en prêter, plusieurs & des plus hupés m’embrasseraient & m’appelleraient encore leur cher ami.

M. Delomer.

N’ayez point de tels amis… je vous souhaiterais un tout autre état, mon cher Dominique ; vous êtes un si brave homme !