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déjà fermés sous des centaines d’aunes de bandelettes et calfeutrés déjà très chaudement dans deux ou trois caisses, recouverts à ma barbe, par un surcroît de soins, d’une belle robe neuve de toile jaune bordée de galons verts. Je voyais enfin de mon observatoire incommode, telle petite bourgeoise de Thèbes, que je n’eusse jamais honorée d’un simple regard, accueillie avec une galanterie raffinée et gracieusement fermée, je ne sais trop pourquoi, dans une petite maison de verre.

Mais ce n’est point assez, c’est au milieu de ces mortifications si cuisantes pour mon amour-propre, qu’on est venu, Sire, mettre le comble à tant d’outrages. Au lieu de me conduire dans un somptueux palais, maintenant que la température de ces contrées devient d’une âcreté jusqu’ici inconnue pour moi, on me laisse dans une basse-cour, exposé à toutes les rigueurs dans la solitude la plus complète ; et c’est là surtout ce qui me décide à recourir enfin à la justice et à la piété de V. M. Au lieu de me garantir des injures de l’air, en me donnant un bel habit jaune bordé de vert, comme à quelques-uns de mes collègues, et même à certains chats et autres animaux, qui ne s’attendaient point à des attentions si délicates, on me couvre grotesquement sous des monceaux de paille. Je me hâte de profiter de l’instant où cette ridicule enveloppe ne me recouvre encore que jusqu’au menton, pour ouvrir enfin la bouche et me plaindre hautement de telle indignité. Quoi ! le Pharaon qui conquit la Bactriane à la tête de 700.000 hommes, qui éleva le plus merveilleux édifice de Thèbes, ne sera plus désormais qu’un roi de paille, ou pour trancher le mot, qu’un roi empaillé ? Non, Sire, Votre Majesté ne le souffrira point : Elle connaît maintenant la longue suite de mes tribulations, j’en appelle à son équité ; c’est en roi qu’il faut qu’on me