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Bajazet

Mais il faut avant tout…Quoi, sultane, parlez…
Je ferai tout cela, j’en donne ma parole !

Roxane

Ah ! sans doute, à vos yeux, je vais passer pour folle ;
Mais prince, je ne puis dompter mes sentiments,
S’il est avec le ciel des accommodements,
L’amour n’en connaît point quand ses ardentes flammes
Comme un torrent de feux, ont calciné nos âmes…
L’amour règne en tyran sur nos sens étonnés ;
Il sait, quand il le veut, nous mener par le nez ;
Rien ne peut résister à sa toute puissance,
Il dispose de nous…

Bajazet

Il dispose de nous…Madame, en conscience,
Je ne vous entends pas : torrent, sens étonnés,
Puissance, amour, tyran, âme, nez calcinés…
Qu’ont-ils donc de commun, ces mots, avec l’empire ?

Roxane

Prince, un petit moment, je m’en vais vous le dire.
Un objet s’est ouvert la porte de mon cœur,
Mais il ne connaît point les feux de mon ardeur ;
Je lui tais mon penchant, et le trait qui me larde.
Mais, hélas ! malgré moi, lorsque je le regarde,
Mon œil, languissamment, décèle mon amour…
Je tremble, je pâlis, et rougis tour à tour…
Cependant le cruel, droit comme une statue,
Écoute le récit du tourment qui me tue…