Page:La Boétie - Discours de la servitude volontaire.djvu/122

Cette page a été validée par deux contributeurs.

nécessaire, non pour autre raison à mon avis sinon pour ce que c’est le premier qui se présente à l’esprit et qui est le plus aisé.

Mais de ma part je ne puis goûter cet entre-deux et ne vois point qu’on puisse attendre rien qu’une manifeste ruine de voir en ce royaume deux religions ordonnées et établies.

Premièrement, le Roi ne le peut faire sans offenser sa conscience, de tant que son devoir est non pas seulement de faire vivre ses naturels sujets en paix et tranquillité, mais encore principalement de prendre qu’ils marchent à droit chemin, et puis qu’ils ne se détournent de la voie de leur salut ; et n’est pas raisonnable qu’en cela il se laisse surmonter aux princes païens, desquels plusieurs, pour l’amour de la vertu, ne se sont pas tant souciés d’avoir en leur rép[ublique] de riches citoyens comme d’en avoir de bons et droit-voyants. Et de deux doctrines si contraires que celles-ci, il n’y en peut avoir qu’une vraie et puisque la chose est venue à tant qu’il y a deux Églises, il faut nécessairement que les unes et les autres soient hors de la vraie Église, et qui n’est qu’une ni ne peut être. Ainsi, quelle excuse peut avoir Sa Majesté de souffrir que l’une des deux parties de son royaume, clairement et sans feinte, fasse profession d’une fausse opinion, et encore non pas simplement d’une opi-