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voulant faire représenter trois pièces de sa composition, c’est à dire une comédie allégorique, intitulée : Reguorum integritas concordia retinetur, puis une moralité en français, inspirée sans doute du Plutus d’Aristophane, enfin, une farce, qui devait terminer le spectacle, dut demander au préalable l’assentiment de la Cour. Le Parlement rendit un arrêt, le 3 février 1560, autorisant la représentation, et cela sur « le rapport de Me Estienne de La Boétie, conseiller commis pour veoir les dites comédie, moralité, et farce, qui auroit dit n’y avoir trouvé aucunes choses scandaleuses »[1]. Le juge, on en conviendra, était on ne peut mieux choisi à tous égards. La représentation eut lieu et elle fut couronnée, paraît-il, d’un si plein succès, qu’il excita la jalousie des clercs de la Basoche.

À cette date, La Boétie demeurait lui-même près du Collège de Guyenne. Le 28 novembre 1559, par devant Me Themer, notaire royal[2], il avait loué aux héritiers Du Rochier une maison « scize et scituée en la présente ville, en la paroisse Sainct Helloy, en la rue de Rostaing, près le collège, sortant de la rue du dict collège d’une part et à ladicte rue de Rostaing de l’aultre ». Le bail était fait pour une année seulement, moyennant « le pris et somme de quatre vingt livres tournois,… payables de quartier en quartier ». Fut-il renouvelé dans la suite, et faudrait-il croire que La Boétie y demeura plus longtemps ? Il n’y a rien d’invraisemblable à cela. La Boétie se trouvait assez rapproché de ses propres relations. Son habitation ne devait pas être éloignée de celles de ses parents de Carle et de Ferron, dont l’impasse de la Rue-Neuve portait alors le nom, et Michel de Montaigne possédait, lui aussi, plusieurs immeubles dans la rue du Mirail, voisine de là, et dans la rue de Sarlat, au quartier de la Rousselle.

Dès lors les nouvelles missions se succédèrent rapidement, et, en se succédant, elles ne firent qu’augmenter d’importance. Dans ces temps de troubles perpétuels, les gages des membres du Parlement étaient toujours en retard, et parfois l’arriéré comprenait plusieurs années. Pour faire cesser ce déplorable état de choses,

  1. Cette intéressante décision a été publiée, avec des notes explicatives, par les soins de M. le conseiller E. Brives-Cazes, dans le tome III sus-mentionné des Archives historiques de la Gironde, p. 465.
  2. Archives départementales de la Gironde, série E, Notaires. Ce document doit figurer dans le tome XXVI des Archives historiques de la Gironde. Il a été récemment découvert par M. Roborel de Climens, qui a eu la bonne grâce de me le faire connaître.