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joignait des lettres de dispenses, qui permettaient au jeune homme d’occuper sa charge. « Attendu, disaient-elles au Parlement, sa suffisance qui supplée en cest endroict l’aage qui lui pourrait défaillir, et ne voulant cela lui nuire et préjudicier en aucune manière, vous mandons… que… vous ayez à recevoir le dict La Boétie au serment[1]. »

Pour se conformer à des ordres aussi formels, la Cour se réunissait le 11 mai 1554, toutes chambres assemblées, et délibérait sur l’admission du postulant. Six jours après, le 17 mai, elle décidait d’admettre Estienne de La Boétie au serment, quoi qu’il n’eût en réalité que vingt-trois ans et demi[2]. Nous trouvons des traces de l’accomplissement de cette formalité dans les registres secrets de la Cour. Nous lisons, en effet, dans le compte rendu de la séance de ce jour, que les chambres s’assemblèrent « pour procéder à l’examen des sieurs Pomiers et La Boétie, lesquels ayant été reconnus idoines et suffisants, furent reçus à prêter serment[3]. »

C’était là une exception flatteuse, sans doute, mais justifiée par les qualités du candidat. Comme son ami Amand de Ferron, qui avait succédé à son père à vingt et un ans seulement, le 10 avril 1536, La Boétie voyait se lever, devant son talent, les rigueurs de la règle. Tous deux se montrèrent dignes de la faveur,

  1. Archives départementales, Reg. du Parlement, vol. 34, f° 124. Les lettres de provision et les lettres de dispense d’Estienne de La Boétie ont été publiées intégralement par M. Roborel de Climens dans le tome XXV des Archives historiques de la Gironde, p. 336.
  2. Et non 1553, comme l’écrit à tort le Dr Payen. On trouvera le récit détaillé de ces deux séances de la Cour dans la Chronique du Parlement de Bordeaux du conseiller Jean de Métivier, publiée par MM. Arthur de Brezetz et Jules Delpit, t. II, p. 63 et suivantes.
  3. Fils du savant président Sauvat de Pomiers, auquel La Boétie a adressé un distique latin conservé dans ses Poemata (f° 166, r°), Pierre de Pomiers, sieur du Breuil, devint conseiller par suite de la résignation de l’office de son père. N’ayant pas encore atteint l’âge légal, il obtint, comme La Boétie, des lettres de dispense datées du 16 avril de la même année (Brives-Cazes, Le Parlement en 1549, p. 194). L’admission de Pierre de Pomiers souleva quelques réclamations.