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PRÉFACE.


La langue française tient le premier rang parmi les langues vivantes de l’Europe. Partout elle exerce la plus heureuse influence sur la civilisation. Si l’on m’accusait d’injustice ou de prévention, je me bornerais à cette courte réponse : Citez-moi le pays où l’on ne parle pas français ? nommez-moi le peuple qui soit resté stationnaire ? Dans leurs accès de mauvais vouloir, nous entendons encore quelques Germains crier à l’engoûment : selon eux la langue française ne s’est épurée que par ses conquêtes ; elle manque de voix mâles et sonores ; elle ne sait exprimer les passions véhémentes. J’aime à croire que ces critiques désintéressées, sont dépouillées de toute morgue nationale : sans doute ils ont longuement médité l’efféminé Corneille, le dur et raboteux Racine, et cent autres, au milieu desquels se drape Voltaire en réunissant les défauts reprochés à tous.

Comme on va le voir, ce n’est pas sans raison que les mécontents déplorent les empiètements qu’ils condamnent.

En 1814 les rois firent un appel aux passions populaires : il fallait frapper au cœur une grande nation ; humilier le héros qui avait enchaîné la victoire et les souverains à son char. Tous les moyens paraissant légitimés par l’urgence, l’outrage fut individuellement prodigué ; la langue française proscrite ; et par supplément le mot liberté tomba du haut d’un trône. À quoi conduisit tant de duplicité ! L’exaltation fut d’abord à son apogée ; mais les faits ont aussi leur langage ; les esprits se calmèrent ;