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Aux inconvénients physiques, nous nous sommes habitués. La sélection a joué. C’est même justement cette accoutumance qui est devenue un des obstacles au retour à la vie nue, que certaines conditions extérieures rendraient, en quelques endroits choisis, plus facile qu’il y a des millénaires. Aux inconvénients moraux, on ne peut faire obstacle que par des essais de réaction et je les tiens, je l’ai dit, pour bienfaisants. Il est patent, à cet égard, que le vêtement a développé tératologiquement la pudeur, sous toutes ses formes insidieuses. Celles-ci font intervenir des idéologies complexes pour classer les facultés physiologiques en une hiérarchie, laquelle exige en conséquence la dissimulation des parties non nobles. Sur cette pudeur, on peut dire que la religion et la société ont bâti leurs plus puissants édifices de préjugés. Il est par suite évident que le goût du nu prouve à tout le moins, et déjà, que l’on est dépourvu de ces préjugés généralement vils et burlesques. Une telle libération est un acquis précieux chez l’individu. Bien entendu, le fait de vivre nu ne confère point l’esprit à ceux qui en manquent, pas même la santé aux malingres. Par lui seul, c’est un effet, voilà tout, un exercice libératoire qui, à certains points de vue, est hygiénique en sus. On ne saurait donc trop approuver tous ces jeux qui ont une valeur sportive sans avoir les inconvénients sportifs. Je suis de ce chef, absolument partisan de clubs nudiques comme il en existe déjà dans quelques pays plus avancés que nous en civilisation. Je crois qu’il serait bon également de créer des colonies, dans une région choisie, où le nu se trouverait non pas imposé, mais admis et encouragé. Il faut en effet s’y entraîner et subir la loi des accoutumances nouvelles. Car le nu, comme tout ce qui tend à libérer l’homme, ne doit pas être simplement l’exercice d’une volonté constamment tendue. En ce cas, il peut y avoir défaillance et retour immédiat aux us anciens. Il faut, au contraire, que cela devienne naturel et quasi instinctif. C’est dans la spontanéité des actions irréfléchies que l’on se libère d’une habitude vicieuse et héréditaire comme celle du vêtement, et bien d’autres… Enfin, il serait bon que l’on comprît et fît comprendre la sottise des protestations contre le nu balnéaire, lequel n’est jamais d’ailleurs que du demi-nu. J’ai vu dans la presse des campagnes grotesques contre les femmes qui montraient sur les plages leur dos et la moitié de leurs seins. C’est du bas réactionnarisme, du plus grossier et du plus