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« Puissant Jupiter et vous immortels fortunés, accourez tous pour être témoins d'une scène plaisante et qu'on ne saurait pourtant tolérer ! Parce que, moi, je suis difforme, la fille de Jupiter me fait sans cesse de nouveaux outrages ; maintenant elle s'unit au pernicieux dieu de la guerre, parce qu'il est beau et leste tandis que moi je suis laid et boiteux ! Mes parents sont seuls cause de ce malheur : ils n'auraient jamais dû me mettre au monde ! — Regarde donc comme Mars et Vénus sont étendus sur ma couche, et comme tous deux ils goûtent les charmes de l'amour ! À ce spectacle, moi, je suis profondément attristé. Malgré leur ardeur, je ne pense pas qu'ils restent longtemps ainsi ; car bientôt ils ne voudront plus dormir l'un près de l'autre : les liens que j'ai forgés pour eux les retiendront jusqu'au jour où le père de Vénus me rendra tous les présents que je lui ai donnés pour obtenir son impudente fille ! Vénus est belle sans doute, mais elle ne peut maîtriser ses passions. »

Ainsi parle Vulcain ; et tous les immortels se rendent dans les demeures d'airain. Bientôt arrivent et Neptune qui agite la terre, et Mercure le bienfaiteur des hommes, et Apollon qui lance au loin les traits ; mais les déesses par pudeur restent dans leur palais. Les dieux, dispensateurs des biens, s'arrêtent sous les portiques ; aussitôt un rire inextinguible éclate au sein de la troupe immortelle lorsque les habitants de l'Olympe aperçoivent les chaînes forgées par Vulcain ; alors ils se disent entre eux :

« Les mauvaises actions ne profitent jamais, et la lenteur triomphe souvent de la vitesse. Aujourd'hui le pesant Vulcain a saisi Mars, le plus agile de tous les immortels. Vulcain, quoique boiteux, l'a emporté par ses ruses sur le dieu des combats, et Mars va lui payer la rançon que doivent les adultères. »


C'est ainsi que parlent les habitants de l'Olympe. Alors le puissant Apollon dit à Mercure :

« Messager céleste, toi le fils de Jupiter et le dispensateur de tous les biens, voudrais-tu être enchaîné comme Mars et reposer comme lui sur cette couche auprès de la blonde Vénus ? »



Mercure lui répond aussitôt :

« Ô puissant Apollon, je voudrais bien qu'il en fût ainsi !