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rempli la moitié de la rue, les mitrailleuses qui l’attendaient partirent, cependant que les portes de toutes les cours des maisons se trouvèrent fermées. La rue fut jonchée de cadavres couvrant les uns les autres.

À Minsk, en apprenant la bonne nouvelle, la population s’est réunie sur la place publique près de la gare ; après avoir échangé des félicitations et décidé d’envoyer un télégramme à Pétersbourg, on commençait à se disperser tout à fait paisiblement, allant chacun de son côté, lorsque surgit un peloton de gendarmes, qui avaient été dissimulé derrière la gare, tirant des coups de feu à droite et à gauche, tuant les uns, blessant les autres. La municipalité indignée envoya cette fois à Pétersbourg une délégation pour protester contre ces procédés et tout finit par une promesse d’enquête…

Comme les roses, la Constitution de Nicolas II n’a vécu que l’espace d’un matin… Elle n’a vécu que quelques heures seulement, pour faire place à un despotisme plus tyrannique et plus féroce que jamais.

Et lorsque les ouvriers à Moscou, exaspérés par le bombardement de la maison, où se tenait un nombreux meeting, prennent à leur tour les armes et dressent des barricades, le tsar envoie de Pétersbourg sa fidèle garde avec des canons et des mitrailleuses pour anéantir les insurgés et raser le quartier entier de Presnia, où ils s’étaient barricadés. À côté des insurgés tombent des habitants paisibles, des femmes et des enfants que les projectiles des braves Semenovtzis ne savent point distinguer.

Aujourd’hui les victimes de cet autocrate, « pacifiste » au delà des frontières de son empire, et massacreur en deçà ne se comptent plus ; le sol de la Sainte Russie est inondé de leur sang, et la semence fructifiera.

N’évoquons point la vision des champs de bataille en Mandchourie, où cent mille enfants du peuple russe dorment leur éternel sommeil.

Or, cette guerre meurtrière entre toutes, qui pourtant eût pu être facilement évitée, fut engagée avec la même préoccupation de Nicolas II d’affermir l’autocratie et d’étayer son trône déjà chancelant. Mais la victoire, sur laquelle ont compté les instigateurs de cette guerre néfaste, s’en alla tout entière du côté des Japonais mieux préparés, mieux armés, plus instruits et aussi