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marins de la Baltique ont assez fait parler d’eux, pour que le gouvernement hésitât à leur confier quelque sanglante besogne. Et récemment encore, pendant la semaine rouge à Moscou, le télégraphe ne nous a-t-il pas rapporté ce fait indéniable, que des régiments étaient consignés dans les casernes, tandis que pour réprimer la révolution le général Doubasoff — homme désormais historique — a demandé de lui envoyer la garde de Pétersbourg, ces gardiens select du tsarisme. Mais, après leurs hauts exploits à Moscou, leur nom seul est devenu odieux et personne ne tend plus la main à un semenovets (du régiment semenovski). Le tempérament slave, très pacifique, porte à la rêverie et à la méditation sera en lui-même une garantie sérieuse pour la paix en Europe, alors que le peuple russe aura conquis sa souveraineté.

Il est loin ce temps, où les journaux de Pétersbourg se répandaient en commentaires enthousiastes à propos du geste de Nicolas II, lorsque, dans les premiers jours de son règne, en compagnie de son auguste épouse, il était, au cours d’une promenade sans apparat et sans aucune escorte, entré dans un magasin comme simple client pour acheter des gants.

Si insignifiant qu’il soit en lui-même, ce fait accusait aux yeux de ses sujets, lassés du régime de poigne sous son père, une pointe de simplicité et de bienveillance, qui lui donnaient une certaine satisfaction et qui corroboraient son espoir en ce souverain, dont la jeunesse même et la bonhomie apparente offraient en quelque sorte un gage d’une nouvelle orientation dans la politique intérieure du pays.

Cet espoir fut bientôt déçu…

Convoqué dans la capitale pour rendre hommage au nouveau monarque et lui témoigner des sentiments sympathiques et du loyalisme des populations, et jusqu’aux petites peuplades exotiques dispersées sur les confins éloignés de l’empire qu’ils représentaient, ces délégués essuyèrent, au premier contact avec leur jeune Maître, un affront, aussi grotesque que maladroit. Alors que, sans faire la moindre allusion aux droits constitutionnels dont, sous le règne précédent la pensée même ne pouvait hanter les esprits — au termes très respectueux, hum-