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L’AVARE PUNI.

Mais si la fortune obstinée
Refuse à sa vertu ses éclatans secours,
Pour lui rendre la foi que son cœur m’a donnée,
Je veux dans un Convent aller passer mes jours.
Ah ! juste Ciel ! le beau recours,
S’écria la vive Soubrette !
Que vous seriez bien satisfaite
D’être entre quatre murs à pleurer vos amours !
Mais enfin au Barbon que faut-il que je die ?
Dis-lui que je le remercie,
Dit la Belle, & qu’en vain il me viendroit prier,
Puisque je ne prétens jamais me marier.
Nantide avoir raison de refuser l’hommage
De ce vieux bouru de Bourgeois :
C’étoit un vilain personnage
Par je ne sçai combien d’endroits.
Il avoir sçu dans son jeune âge
Manger son patrimoine, en moins de quinze mois ;
Courant de Coquette en Coquette,
De Berlan en Berlan, de Grisette en Grisette,
Sans honte, sans égard, sans choix :
S’il se trouvoit dans le Village,
La Meûniere étoit son partage,
Quand elle l’eût été déja de deux ou trois ;
Tout étoit bon pour son libertinage.
Lorsqu’il se vit sans fonds, & sans nul revenu,
Il n’est ni détours, ni souplesses,
Passe-droits, mauvaises finesses
Qu’il n’employât pour avoir des écus,
Qu’il portoit aux Traiteurs aux Berlans, aux Maitresses.