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écus romains, comme Clément de deux cent vingt-cinq. J’en avois gagné mil huit cent soixante-quinze et je ne pouvois pas être indifférent à cette somme, car mon trésor après les dépenses du carnaval s’acheminoit à sa fin.

L’écu romain vaut un demi-sequin. Ma fille fit rire la compagnie, me demandant pourquoi je n’avais joué le numéro pour second extrait pour tout le monde. Clément vint m’embrasser et m’avoua qu’il avoit joué le numéro, lui aussi, dix écus pour second extrait. Il gagnoit 750 écus ; je lui en ai fait les plus sincères complimens. J’ai alors confirmé ma parole de les tenir à Rome à mes frais toute la semaine sainte. La signora Veronica se dispensa à cause de son école et Clément à cause de sa boutique. La partie fut composée de Mariuccia avec Jacomine et Guillelmine et moi, et nous partîmes le dimanche au point du jour.

Quel plaisir de me voir l’objet de l’adoration de ces trois créatures ! Ces beaux momens dans ma vie furent ceux qui me rendirent cent fois plus heureux que les mauvais ne me rendirent malheureux. Je les ai menées chez moi, me moquant de Marguerite, qui me fit la moue quand j’ai ordonné à sa mère de me dresser deux lits dans la chambre contiguë à la mienne, où demeuroit Ceruti. Après avoir ordonné à la mère de Marguerite à dîner et à souper pour cinq jusqu’au second jour de Pâques, je les ai conduites dans une voiture de Roland à Saint-Pierre, et partout dans le courant de la semaine. Ce qui calma Marguerite fut le plaisir que je lui ai procuré de dîner avec nous ; et elle ne put pas y trouver à redire quand je lui ai dit que dans les huit jours je ne pourrois pas la laisser entrer dans ma chambre après souper. J’ai laissé qu’elle s’imagine que celle qui viendroit se coucher avec moi seroit la signora Mariuccia. Voyant Jacomine, elle n’eut pas de difficulté à deviner que c’étoit ma fille et que je devois avoir aimé sa mère dix ans avant ce tems-là. Elle imagina de Guillelmine ce qu’elle voulut. Mariuccia après souper alloit se coucher et les deux jeunes filles venoient dans ma chambre comme elles faisoient à Frascati. J’ai passé huit jours très heureux, quoique à très cher prix, puisque j’ai dépensé au-delà de quatre cents sequins en étoffes, en toiles et en bijoux de toutes les espéces, sans oublier la signora Veronica, à laquelle Guillelmine porta tous les présens que j’ai acheté les lui dest