Page:L’Art priapique, parodie des deux premiers chants de l’art poétique, 1864.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
28
L’ART POÉTIQUE.

Surtout de ce poëme il bannit la licence :
Lui-même en mesura le nombre et la cadence ;
Défendit qu’un vers faible y pût jamais entrer,
Ni qu’un mot déjà mis osât s’y remontrer.
Du reste, il l’enrichit d’une beauté suprême :
Un sonnet sans défaut vaut seul un long poëme.
Mais en vain mille auteurs y pensent arriver,
Et cet heureux phénix est encore à trouver.
À peine dans Gombault, Maynard et Malleville,
En peut-on admirer deux ou trois entre mille ;
Le reste, aussi peu lu que ceux de Pelletier,
N’a fait de chez Sercy qu’un saut chez l’épicier.
Pour enfermer son sens dans la borne prescrite,
La mesure est toujours trop grande ou trop petite.
L’épigramme, plus libre en son tour plus borné,
N’est souvent qu’un bon mot de deux rimes orné.
Jadis de nos auteurs les pointes ignorées
Furent de l’Italie en nos vers attirées ;
Le vulgaire, ébloui de leur faux agrément,
À ce nouvel appât courut avidement.
La faveur du public excitant leur audace,
Leur nombre impétueux inonda le Parnasse.
Le madrigal d’abord en fut enveloppé ;
Le sonnet orgueilleux lui-même en fut frappé ;
La tragédie en fit ses plus chères délices ;
L’élégie en orna ses douloureux caprices ;