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IX
PRÉFACE.

vivant : Abraham, regardé de son temps seulement comme un riche ménager, et après sa mort comme un grand patriarche ; Moïse, envoyé du Très-Haut, ayant passé plusieurs fois pour un charlatan chez les Hébreux ; Jésus lui-même traité d’aventurier séditieux par les calotins juifs. Dans l’histoire profane, l’on verrait bien des tyrans tels qu’Auguste, Constantin et Louis XI, préconisés par des auteurs contemporains, et d’excellens princes, tels que Trajan et Julien, cruellement dénigrés par des plumes chrétiennes dans l’Histoire de la philosophie, des sciences et des lettres ; je ferais voir Homère quêtant son pain de ville en ville, Galilée en prison, Descartes expatrié, Jean-Jacques lapidé, Racine sifflé, Pradon applaudi, etc., etc. Mais je sais que mon érudition pourrait me mener trop loin sur l’article de la versatilité des opinions humaines, et je n’ai pas le temps de m’y livrer, car j’écris à la hâte sur des chiffons arrachés de mes mains à mesure que je les ai noircis, et cet empressement de mon imprimeur est pour moi un augure plus favorable que ne furent jamais ceux des trépieds à Delphes, des poulets à Rome, du gui de chêne à Marseille,