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il l’avait tiré de prison malgré toute sa famille. Il dit comment le brave Roger, pour le récompenser de ce dévouement, avait déployé à son égard une générosité qui dépassait tout ce qu’on avait jamais vu, et tout ce qu’on verrait jamais.

Poursuivant, il narra de point en point ce que Roger avait fait pour lui, et comment, désespéré d’être obligé de renoncer à sa femme, il avait résolu de mourir. Il dit comment l’infortuné était près de rendre l’âme quand il put venir à son secours, et le détourner par ses affectueuses paroles de sa fatale résolution ; et il exprima tout cela en termes si doux, si affectueux, qu’il n’y avait pas un œil qui restât sec.

Puis il s’adresse d’une manière si efficace à l’obstiné duc Aymon, que, non seulement il l’émeut, l’entraîne et le fait changer de sentiment, mais qu’il le fait consentir à aller lui-même supplier Roger de lui pardonner et de l’accepter pour beau-père, lui promettant enfin la main de Bradamante.

Pendant ce temps, celle-ci, doutant de sa propre existence, pleurait sur ses malheurs au fond de sa chambre la plus retirée. Soudain des cris joyeux se font entendre ; on accourt en toute hâte lui annoncer l’heureuse nouvelle. Tout son sang, qui s’était porté au cœur sous le coup de sa douleur intense, reflue subitement aux extrémités, et la donzelle reste quasi morte de joie.

La force l’abandonne tellement, qu’elle ne peut se tenir debout, elle, si renommée pour sa vigueur corporelle et pour son énergie. Elle n’éprouve pas