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« Le jeune Tanacre brûla pour elle des mêmes feux dont son frère avait été embrasé pour une autre et qui, en lui mettant au cœur un désir injuste, lui avait fait trouver une fin malheureuse. Il n’hésita pas plus que son frère à violer l’hospitalité sacrée, plutôt que de se laisser mourir sans satisfaire sa passion violente.

« Mais comme il avait devant les yeux l’exemple de son frère qui avait trouvé la mort dans son entreprise, il résolut de s’emparer de la dame, de façon qu’Olindre ne pût en tirer vengeance. Tout sentiment de vertu s’éteignit subitement en lui, et les vices dans lesquels son père avait toujours été plongé l’inondèrent de leurs flots tumultueux.

« Pendant la nuit, il rassembla dans le plus grand silence une vingtaine d’hommes armés, et les mit en embuscade sous une grotte qui se trouvait sur la route, loin du château. Olindre, en arrivant à cet endroit, se vit barrer de tous côtés le passage, et, bien qu’il se défendît vigoureusement et longtemps, il perdit en même temps sa femme et la vie.

« Olindre mort, Tanacre emmena captive la belle dame affolée de douleur, et qui demandait la mort comme une grâce. Résolue à mourir, elle se précipita du haut d’un rocher qui s’avançait sur un précipice, mais elle ne put se tuer ; on la releva la tête fendue et le corps brisé.

« Tanacre dut la faire porter au château sur une civière. Il la fit panser avec le plus grand soin, car il ne voulait pas perdre une proie si chère. Pendant qu’il s’efforçait de la rendre à la