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de l’obtenir de force. Il revêtit ses armes, et alla s’embusquer non loin du château, dans un endroit où les deux voyageurs devaient passer. Son audace habituelle, l’amoureuse flamme dont il brûlait, ne lui permirent point d’agir avec prudence ; aussi, des qu’il vit arriver le chevalier, il courut sur lui pour l’assaillir, lance baissée.

« Il croyait le désarçonner au premier choc, et gagner d’un même coup la victoire et la dame. Mais le chevalier, qui était maître en fait de guerre, lui brisa sa cuirasse comme si elle eût été de verre. La nouvelle parvint au père, qui fit transporter son corps sur une civière au château où il l’ensevelit, avec de grandes marques de deuil, à côté de ses antiques aïeux.

« L’hospitalité n’en continua pas moins à être généreusement accordée à tous venants, car Tanacre était aussi libéral et aussi courtois que son frère. Dans le cours de la même année, un baron se présenta au château avec sa femme, venant de pays lointain. Il était d’une étonnante vaillance, et sa compagne était gracieuse et belle autant qu’on peut le dire.

« Non moins que belle, elle était honnête, courageuse et vraiment digne d’être louée en tout. Le chevalier appartenait à une illustre famille, et dépassait en vaillance tout ce qu’on avait entendu dire des autres chevaliers. Il était naturel que tant de valeur lui eût mérité une compagne d’un tel prix. Le chevalier s’appelait Olindre de Longueville et la dame Drusille.