Page:L’Arioste - Roland furieux, trad. Reynard, 1880, volume 4.djvu/125

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peut se défendre, car Brandimart lui a également enlevé son épée.

Gradasse fait volte-face, et ne pense plus à poursuivre Roland. Il accourt vers l’endroit où il voit le roi Agramant, L’imprudent Brandimart, ne pensant pas que Roland ait laissé échapper Gradasse, n’a d’autre préoccupation, d’autre pensée que de plonger son poignard dans la gorge du païen. Soudain Gradasse arrive sur lui et, prenant son épée à deux mains, lui en porte de toute sa force un coup sur le casque.

Père du ciel, fais parmi tes élus une place au martyr de ta foi. Arrivé à la fin de son tempétueux voyage, qu’il puisse désormais replier sa voile dans le port. Ah ! Durandal, peux-tu être assez infidèle à ton maître Roland, pour tuer ainsi sous ses yeux le compagnon le plus cher, le plus dévoué qu’il ait au monde ?

Un cercle de fer, épais de deux doigts, entourait le casque de Brandimart ; il fut partagé et rompu par le coup terrible, ainsi que la coiffe d’acier qui était par-dessous. Brandimart, la face toute pâle, tombe de cheval ; un énorme jet de sang s’échappe de sa tête, et se répand comme un fleuve sur le sable.

Le comte, ayant repris ses sens, jette les yeux autour de lui et aperçoit son cher Brandimart étendu par terre ; il voit, au maintien du Sérican, quel est celui qui lui a donné la mort. Je ne saurais dire quel sentiment l’emporta en lui, de la douleur ou de la colère. Mais il avait si peu de