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Elle se fit lacer son casque par son écuyer, car elle avait déjà sur elle le reste de ses armes. Je ne crois pas que, dans toute sa vie, elle ait été vue plus de dix fois sans son haubert, du jour où, brûlant de s’illustrer, elle se décida à l’endosser. Le casque en tête, elle se dirigea vers les gradins les plus élevés, où Brunel était assis au milieu des premiers seigneurs de la cour.

À peine arrivée près de lui, elle le saisit en pleine poitrine, et l’enleva aussi facilement que l’aigle rapace enlève un poulet dans ses serres crochues. Elle le porta ainsi jusqu’à l’endroit où le fils du roi Trojan cherchait à apaiser la dispute. Brunel, se voyant en de si mauvaises mains, ne cessait de pleurer et de demander merci..

Par-dessus la rumeur, le vacarme, les cris dont tout le camp était pour ainsi dire partout rempli, le bruit que faisait Brunel qui faisait appel tantôt à la pitié, tantôt au secours des assistants, s’entendait si fort, qu’à ses plaintes, à ses hurlements, les.soldats accoururent de tous côtés. Arrivée devant le roi d’Afrique, Marphise, l’air altier, lui parla de cette façon :

« Je veux pendre.par le col, de mes propres mains, ce larron, ton vassal, parce que le jour même qu’il enleva le cheval de celui-ci, il me vola mon épée. Et si quelqu’un prétend que je ne dis pas la vérité, qu’il s’avance et prononce un seul mot ; en ta présence, je soutiendrai qu’il en a menti et que je fais selon mon devoir.

« Mais comme on pourrait peut-être me repro-