« Il n’en arrivera pas comme tu penses — répond Mandricard à Rodomont — C’est moi qui te donnerai plus de besogne que tu ne voudras, et te ferai suer des pieds à la tête. Il me restera encore assez de vigueur — de même que l’eau ne manque jamais à la fontaine — pour tenir tête à Roger, à mille autres avec lui, et à tout l’univers s’il veut lutter contre moi. »
La colère et les paroles de défi allaient se multipliant de tous les côtés. L’irritable Mandricard veut combattre en même temps Rodomont et Roger. Celui-ci, qui n’est pas habitué à supporter l’outrage, ne veut plus entendre parler d’accommodement ; il ne respire que bataille et dispute. Marphise va de l’un à l’autre pour rétablir la paix, mais elle ne peut suffire seule à une aussi forte tâche.
Souvent, lorsque le fleuve a franchi ses rives élevées et cherche à se creuser un nouveau lit, le villageois, ardent à défendre contre l’inondation ses verts pâturages et la moisson en laquelle il espère, se morfond à combler tantôt une brèche, tantôt une autre. Pendant qu’il répare le côté qui menace de tomber, il voit sur un autre point céder la digue trop faible, et l’eau se précipiter par-dessus avec plus d’impétuosité.
Ainsi, pendant que Roger, Mandricard et Rodomont sont tous les trois à se disputer, chacun d’eux voulant se montrer le plus vaillant, et prendre l’avantage sur ses compagnons, Marphise s’efforce de les apaiser. Mais elle perd sa fatigue et son temps. À peine a-t-elle réussi à en tirer un hors