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serait le premier désigné par le sort combattrait seul. Mais,s’il advenait que l’ennemi fût assez fort pour rester en selle et désarçonner son adversaire, les autres seraient obligés de combattre tous à la fois, jusqu’à la mort. Chacun d’eux étant redoutable, vous voyez ce qu’ils doivent être quand ils sont tous ensemble.

« Il importe qu’aucun retard, qu’aucun obstacle ne vienne s’opposer à notre entreprise ; il faut donc éviter ce combat. Je suppose que vous en sortiriez vainqueurs, et votre fière prestance me donne la certitude qu’il en serait ainsi ; mais la chose ne se ferait point en une heure, et il est à craindre que le jouvenceau ne soit livré aux flammes, s’il n’est pas secouru aujourd’hui même. »

Roger dit : « Ne nous inquiétons pas de cela. Faisons de notre côté tout ce qu’il nous sera possible de faire, et laissons le reste à celui qui gouverne le ciel, ou, à son défaut, à la fortune. Tu pourras voir, par ce combat, si nous sommes assez bons pour venir en aide à celui qu’on doit aujourd’hui brûler pour une faute si légère et si douce. »

Sans plus répondre, la donzelle prit par la voie la plus courte. Ils n’allèrent pas plus de trois milles, sans arriver au pont et à la porte où les vaincus devaient déposer les armes et leurs vêtements, après avoir couru le risque de perdre la vie. À leur apparition, la cloche du château retentit par deux fois.

Et voici qu’en dehors de la porte un vieillard s’avance, au grand trot d’un roussin ; et il s’en