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avide, altérée de vengeance, suivit Pinabel toujours disposé à la seconder là où il y aurait du mal à faire. Elle ne dormait ni jour ni nuit, et elle finit par lui dire qu’elle ne serait contente qu’après qu’il aurait forcé mille chevaliers et mille dames à mettre pied à terre, et à quitter leurs armes et leurs vêtements.

« Le même jour, le hasard conduisit dans son château quatre valeureux chevaliers, arrivés depuis peu des contrées les plus lointaines. Leur valeur est telle, que notre époque n’en a pas de meilleurs. Ils se nomment Aquilant, Griffon et Sansonnet ; le quatrième, Guidon le Sauvage, est un tout jeune homme.

« Pinabel, avec un grand semblant de courtoisie, les accueillit au château que je vous ai dit. Puis, pendant la nuit, il les fit prendre dans leur lit, et ne leur rendit la liberté qu’après leur avoir fait jurer que, pendant un an et un mois, — ce fut le terme précis qu’il exigea, — ils habiteraient le château et dépouilleraient tous les chevaliers errants qui passeraient.

« Quant aux damoiselles qui seraient avec eux, ils devaient les faire descendre de cheval et leur enlever leurs vêtements. Ayant fait un tel serment, ils furent forcés de le tenir, quelque ennui, quelque chagrin qu’ils en eussent. Jusqu’à présent, ils n’ont trouvé personne qui ait pu leur résister et qui n’ait dû mettre pied à terre ; et déjà beaucoup s’en sont retournés à pied et sans leurs armes.

« Ils ont établi entre eux que celui dont le nom