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fameux par ses pyramides. La populeuse cité du Caire se voit à l’opposé.

Toute la population accourait pour voir le géant démesuré. Comment est-il possible, disait-on, que ce petit guerrier ait enchaîné ce géant ? Astolphe pouvait à peine avancer, tant la foule le pressait de tous côtés. Chacun l’admirait et le comblait d’honneurs, comme un chevalier de haute valeur.

Le Caire n’était pas alors aussi grand que de notre temps, car dix-huit mille grandes rues ne peuvent contenir la population. Bien que les maisons aient trois étages, beaucoup d’habitants dorment dans les rues ; le soudan habite un château d’une immense étendue, admirablement riche et beau.

Ses vassaux, au nombre de quinze mille, tous chrétiens renégats, y sont logés avec leurs femmes, leurs familles et leurs chevaux. Astolphe veut voir où et par combien d’embouchures le Nil entre dans les flots salés à Damiette. Il avait, du reste, entendu dire que quiconque passait par là était mis à mort ou pris.

En effet, sur la rive du Nil, près de l’embouchure, se tient dans une tour un brigand qui tue les paysans et les voyageurs, et, pillant tout le monde, porte ses ravages jusqu’au Caire. Personne ne peut lui résister ; on raconte que c’est en vain qu’on chercherait à lui arracher la vie. Il a déjà reçu plus de cent mille blessures, et jamais on n’a pu parvenir à le tuer.

Pour voir s’il peut faire trancher le fil de sa vie par la Parque, Astolphe s’en va à la recherche