moins de temps, elle se sent atteinte elle-même au cœur d’une blessure plus grande.
Elle ressent, plus large et plus profonde, la blessure que lui a faite au cœur la flèche invisible lancée par l’archer ailé qui s’est caché dans les beaux yeux et la tête blonde de Médor. Elle se sent brûler d’un feu qui augmente sans cesse, et plus elle soigne le mal de son ami, moins elle a souci de son propre mal ; elle ne songe qu’à guérir celui qui la blesse et la fait souffrir elle-même.
Sa plaie s’ouvre et s’agrandit à mesure que celle de Médor se guérit et se ferme. Le jeune homme recouvre la santé ; elle languit, en proie à une fièvre nouvelle, qui la glace et la brûle tour à tour. De jour en jour sa beauté s’étiole ; la malheureuse dépérit, comme fond une flaque de neige tombée dans une saison intempestive, et que le soleil frappe à découvert.
Si elle ne veut pas mourir de désir, il faut que sans retard elle se vienne elle-même en aide. Elle ne peut plus attendre qu’on lui demande ce qu’elle brûle de donner. Aussi, bannissant toute vergogne, elle emploie, pour se faire comprendre, un langage non moins ardent que ses yeux. Et, du coup, elle réclame merci, sans savoir que peut-être elle l’accorde elle-même.
Ô comte Roland, ô roi de Circassie, dites, à quoi vous a servi votre éclatante valeur ? Dites, à quel prix doit-on estimer votre gloire sans pareille ? Quelle récompense ont obtenue vos services ? Montrez-moi une seule faveur, ancienne ou