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Cet Aramon était tombé mort. Son frère accourt pour le secourir, mais Dardinel lui ouvre les reins jusqu’à l’endroit où l’estomac est fourchu. Puis il transperce le ventre à Bugio de Vergalle, et le délie de son serment : il avait promis à sa femme de retourner auprès d’elle au bout de six mois et vivant.

Dardinel voit non loin de là le vaillant Lurcanio qui vient de renverser Dorchin, auquel il a percé la gorge, et Gardo dont il a fendu la tête jusqu’aux dents. Il voit Altée fuir, mais trop tard, Altée qu’il aimait plus que sa propre vie, et que le farouche Lurcanio occit d’un coup asséné derrière la nuque.

Il saisit une lance et court le venger, en disant à son écuyer Macon, qui peut à peine l’entendre, que s’il met Lurcanio à mort, il suspendra ses armes en ex-voto dans la grande mosquée. Puis, franchissant d’un bond la distance qui les sépare, il le frappe au flanc avec une telle force que la lance sort de l’autre côté. Il ordonne ensuite aux siens de prendre ses dépouilles.

Il est inutile de me demander si Ariodant, le frère de Lurcanio, dut ressentir une profonde douleur, et s’il désira ardemment envoyer de sa main Dardinel parmi les âmes damnées. Mais la foule des combattants, aussi bien du côté des infidèles que des chrétiens, ne lui permet pas de mettre son projet à exécution. Il veut pourtant se venger, et de çà, de là, il cherche à s’ouvrir un chemin avec son épée.