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avait raison, tandis que l’adversaire battu, l’adversaire tué perdait son honneur, perdait sa cause.

De nos jours, Dieu merci, l’humanité s’est émancipée de ce point de vue tout physique, et l’on comprend qu’il est possible de trancher les différends de toute nature par des jugements basés sur des idées, sur des idéals moraux universellement reconnus. De nos jours, Dieu merci, on admet que les questions d’honneur ne se peuvent décider au moyen des coups, au moyen du meurtre, car l’honneur n’est lui-même qu’une idée, un idéal : comme tel il n’a aucun rapport avec le monde physique et par conséquent il ne peut pas être prouvé au moyen des coups, au moyen des duels, etc.

Dans le bon vieux temps, les duels étaient en vogue, parce que l’humanité était encore trop matérielle, trop asservie à sa nature charnelle, et elle ne pouvait pas encore comprendre la force de la pensée, la force du monde des idées ; mais à présent on comprend que si quelqu’un a exprimé un doute sur l’intégrité de mon honneur, je ne prouverais rien en le