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L’ANARCHIE PASSIVE

pour chaque phénomène, même passager, le développement progressif de l’homme s’arrête et se perd ; car le contrôle mutuel faisant défaut, les hommes, au lieu de s’entr’aider mutuellement tout en luttant, commencent à s’exterminer avec acharnement. Prenez, par exemple, les périodes des grandes révolutions sociales, alors que tout ordre, tout sens commun et par conséquent toutes lois sont renversés : regardez ce que nous présente alors l’homme, quelle terrible méfiance envers ses semblables, quelles haines atroces, quelles cruautés invraisemblables, quels crimes, quelles horreurs ! On a eu raison de dire que si l’homme, privé du sang, devient la proie de convulsions physiques musculaires, l’homme, privé du soutien et du contrôle de la vie sociale, devient la proie de convulsions psychiques, qu’il est jeté, par ses passions et ses impulsions, d’une extravagance dans l’autre, d’une exagération dans l’autre, et que toutes les idées, tous les idéals, toute la spiritualité sombrent dans la lutte primitive, dans la lutte physique d’un monde animal et brutal.

Il ne faut pas oublier que la vie sociale agit