tout ce que Lupanie avait à lui dire. Elle l’appela bien plusieurs fois et mit en usage tous les artifices dont elle se servait pour calmer les emportements de ses amants, mais inutilement, il ne la voulut voir ni entendre depuis ce jour-là, et en publia toutes les médisances imaginables. Elle se consola facilement de sa perte par la réflexion qu’elle fit de ne pouvoir plus recevoir ses visites sans de fâcheuses suites après ce qu’elle avait dit à Schelicon.
De plus, il n’était pas si libéral qu’il avait été, et l’argent lui manquait fort souvent, outre qu’en amour le changement lui plaît infiniment. Elle ne demeura pas longtemps dans cette vie fainéante ; elle recouvrit bientôt un autre amant qui valait bien Cléandre à son avis : il ne disait pas tant, mais en faisait davantage, et l’heureux partage qu’il avait eu de la nature lui tenait lieu d’esprit et de mérite. Après cela, il en vint un autre, et enfin elle fit si bien qu’elle ne laissa pas échapper un jeune homme de Callopaidie qui payât de mine sans s’instruire de son fort et de son faible.
Cependant cette vie libertine fut sue dans toute la ville, tant par leur indiscrétion que par la veine satyrique de Cléandre, qui fit cette élégie :
J’avais cru jusqu’ici qu’aussitôt qu’une fois
Qu’un cœur avait reçu les amoureuses lois