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Secondement en ce que la prescience de Dieu est tout à fait exacte, et que celle des astronomes ne l’est pas ; parce que les lignes des mouvemens célestes ne sont pas si régulières qu’ils les supposent, et que leurs observations ne peuvent pas être de la première justesse.

On ne peut trouver d’autres convenances, ni d’autres différences.

Pour rendre la prescience des astronomes sur les éclipses égale à celle de Dieu, il ne faudrait que remplir ces différences.

La première ne fait rien d’elle-même à la chose ; il n’importe pas d’avoir établi un ordre pour en prévoir les suites, il suffit de connaître cet ordre aussi parfaitement que si on l’avait établi ; et quoiqu’on ne puisse pas en être l’auteur sans le connoître, on peut le connaître sans en être l’auteur.

En effet, si la prescience ne se trouvait qu’où se trouve la puissance, il n’y aurait aucune prescience dans les astronomes sur les mouvemens célestes, puisqu’ils n’y ont aucune puissance. Ainsi Dieu n’a pas la prescience en qualité d’auteur de toutes les choses, mais il l’a en qualité d’être qui connoît l’ordre qui est en toutes choses.

Il ne reste donc qu’à remplir la deuxième différence qui est entre la prescience de Dieu et celle des astronomes. Il ne faut pour cela que supposer les astronomes parfaitement instruits de l’irrégularité des mouvemens célestes et les observations de la dernière justesse. Il n’y a nulle absurdité à cette supposition.

Ce serait donc avec cette condition qu’on pourrait assurer sans témérité, que la prescience des astronomes sur les éclipses, serait précisément égale à celle de Dieu en qualité de simple prescience : donc la prescience de Dieu sur les éclipses ne s’étendrait pas à des choses où celle des astronomes ne pourrait s’étendre.

Or il est certain que, quelque habiles que fussent les astronomes, ils ne pourraient pas prévoir les éclipses, si le soleil ou la lune pouvoit quelquefois se détourner de leur cours indépendamment de quelque cause que ce soit, et de toute règle.

Donc Dieu ne pourrait pas non plus prévoir les éclipses, et ce défaut de prescience en Dieu ne viendrait non plus