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L’ÉTOURDI.


un tout pareil. Sa gaîté, ſa triſteſſe, ſa tranquillité, ſon inquiétude, toutes ſes différentes diſpoſitions deviennent les miennes, Non par aucun ſoin que j’aie de m’y conformer, mais par un reſſort ſecret qui les rend ſemblables… Que je ſerais heureuſe ſi je pouvais ; aſſocier ma vie avec la ſienne !… J’avoue que vos ſoupçons m’humilieraient, s’ils étaient réels. Ma délicateſſe & ma tendreſſe feraient peu ſatisfaites, ſi je ne pouvais me glorifier d’une préférence dans ſon cœur qui ne me laiſſat aucun lieu de douter que ma fortune n’y a point de part. Idée accablante, ceſſe de t’offrir à moi ! Tu m’avilis à mes propres yeux, tu fais plus de mal encore, tu outrages mon amant.

Adieu, chere & charmante Lucie, dans votre ſein ſeul j’épanche le mien.



Ô ma Lucie ! que l’habitude de voir ce que l’on aime ſe contracte aiſément ; & que cette habitude devient douloureuſe lorſqu’elle trouve ſon terme. Nous ſommes de retour depuis