d’éloigner de moi toute personne qu’elle supposera
pouvoir diminuer l’influence qu’elle croit
avoir sur mes sentiments ; de là sa jalousie. Il faut
pourtant être juste : elle est, malgré ou plutôt
à cause de cette folie, d’un dévouement et
d’une discrétion à l’épreuve des plus grandes
tentations. Je lui ai donné un amant, espérant
par là détourner sa malheureuse passion pour
moi. Ah bien oui ! elle le souffre, et voilà tout ;
et encore parce qu’elle sait que celà m’est
agréable. Me séparer d’elle me paraît bien difficile ;
elle connaît mes affaires, même mes secrets,
et quoique je sois certaine qu’elle ne fera
jamais rien contre moi, je ne serais pas tranquille
si elle me quittait. Que faire donc ? J’ai
pensé qu’en l’admettant quelquefois en tiers à
nos réunions secrètes, je calmerais sa jalousie à
ton égard ; car on supporte plus facilement un fait
accompli sous nos yeux qu’un malheur inconnu
et qu’on redoute ; et puis, par la raison qu’elle
a une grande idée de ta beauté, puisqu’elle la
craint, il est possible qu’avec sa tête exaltée
elle te prenne aussi en grande affection, et alors…
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L’ÉCOLE DES BICHES