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même de l’activité. « Or, écoutez ma parole, ô sages d’entre les sages ! Vérifiez-la sérieusement pour voir si j’ai pénétré jusqu’au cœur même de la vie, et jusque dans les recoins de son cœur !

« Où j’ai trouvé de la vie, là j’ai trouvé de la volonté de puissance ; et jusque dans la volonté du serf, j’ai trouvé la volonté d’être seigneur[1]. »

Selon Stirner, le Moi est unique et par là même souverain ; il n’y a qu’à dépenser ses forces. Selon Nietzsche, toute vie est soumise à une loi qui l’oblige à aspirer sans cesse à la puissance et par là même à se dépasser sans cesse elle-même.


e) Le christianisme


Ainsi s’expliquent les jugements que les deux philosophes portent sur le christianisme. Stirner admire d’une part, dans le christianisme, l’esprit de rebellion : le christianisme est en effet une rebellion contre la nature et une rebellion contre la société ; Jésus est un grand révolté (Empörer)[2] ; Stirner attaque d’autre part la hiérarchie morale et sociale que le christianisme a imposé au Moi.

Nietzsche trouve que l’idéal ascétique a eu cet avantage de donner, en attendant mieux, un sens à la terre ; il est préférable de vouloir le Néant que de ne pas vouloir ; mais le christianisme a été une

  1. Nietzsche, Also sprach Zarathustra, VI, 167.
  2. Stirner, Der Einzige, p. 371.