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A. MEILLET. — CONVERGENCES DES DÉVELOPPEMENTS LINGUISTIQUES

que of ; l’ordre des mots est autre que dans the house of the father, mais il est également fixe dans cette manière de s’exprimer. Ainsi en français, en anglais, en persan, on observe le même changement de structure par rapport à l’indo-européen : un ordre fixe des mots est substitué à un ordre libre, et un mot accessoire exprime la fonction ; mais si l’ordre est toujours fixe, il n’est pas le même dans toutes les langues et dans toutes les constructions ; et, s’il y a des mots accessoires, ces mots sont divers et d’origines diverses.

On peut multiplier les exemples de ce genre ; on rencontrera toujours le même type de faits parallélisme des changements de structure générale, divergence des innovations portant sur les moyens matériels d’expression.

Dans les cas où une langue se différencie sans changer de type, le parallélisme des développements indépendants aboutit souvent à des résultats identiques, même dans le détail matériel de la forme. Ainsi la 1re personne du présent des verbes admettait en indo-européen deux finales suivant les cas ; ces deux finales sont bien conservées en grec ; il y a une finale dans des verbes comme legō « je dis », et une finale -mi dans des verbes comme didōmi « je donne » ; c’est la distinction des verbes en et des verbes en -mi, bien connue de tous ceux qui ont étudié quelques éléments du grec. La finale -o avait plusieurs inconvénients ; elle manquait de corps surtout dans les langues où les voyelles des syllabes finales tendent à s’altérer, ce qui arrive très souvent ; il est résulté de là une tendance à étendre l’emploi de -mi aux dépens de celui de . Or, cette tendance s’observe dans une grande partie du domaine indo-européen : dans le groupe indo-iranien, toutes les premières personnes ont reçu -mi au présent, et, si un heureux hasard n’avait pas fait conserver quelques textes en un ancien dialecte iranien où le représentant de l’ancien a subsisté, on ne pourrait même pas démontrer que l’indo-iranien a connu autre chose que des 1res personnes en -mi ; l’arménien a généralisé l’emploi de -mi (sous la forme -m) dans tous les présents ; l’irlandais a aussi étendu l’emploi de l’ancien -mi (tout en conservant le type en en certaines conditions), et il a par exemple scaraim « je me sépare », tandis que, dans le même type de verbes, le latin a amō ; en germanique, le vieux haut allemand a la 1re personne salbōm