Page:Lévy-Bruhl - Revue philosophique de la France et de l’étranger, 103.djvu/33

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les ouvrages Des noms divins et de la Théologie mystique formaient, avec deux autres ouvrages perdus, les Esquisses théologiques et la Théologie symbolique, un cours complet de théologie dont le plan est donné au chapitre iii de la Théologie mystique. Les trois premiers ouvrages, Esquisses, Noms et Théologie symbolique comprenaient la théologie positive, étudiant successivement dans les Esquisses la Trinité qui est au-dessus du monde intelligible ; dans les Noms, les dénominations de Dieu empruntées à l’ordre des intelligibles bien, être, vie, intelligence, etc. ; dans la Théologie symbolique, les attributions de Dieu qui sont empruntées au monde sensible, colère, jalousie, serment, etc. Le dernier ouvrage, la Théologie mystique, contient la théologie négative et montre, en suivant l’ordre inverse de la théologie positive, qu’aucune dénomination, empruntée au sensible ou à l’intelligible, ne convient à Dieu.

Denys ne définit nulle part sa situation par rapport au néoplatonisme païen ; dans ses lettres, on le voit se refuser à toute polémique avec les païens ; d’autre part, il nous fait connaître l’opinion d’un « sophiste païen », Apollophane au sujet de ses écrits : « Ce sophiste, dit-il, m’injurie et m’appelle parricide, parce que j’utilise d’une façon impie les Grecs contre les Grecs[1]. » Le voilà donc nettement accusé, du côté païen, de se servir du néoplatonisme au profit du christianisme ; et, de fait, bien qu’il se vante de tirer toute sa « philosophie » ou « théosophie » de l’Écriture[2], il est vrai que sa pensée est toute imprégnée des idées de Proclus, particulièrement sous les trois aspects suivants :

Dieu, étant la cause de tout, contient tout, à la manière dont la cause contient l’effet, c’est-à-dire qu’on peut attribuer à Dieu tous les noms des créatures, Vie, Sagesse, etc., à condition de prendre ces noms au sens de Cause de vie, Cause de sagesse, etc. ; et c’est le principe de la théologie positive ; mais Dieu étant cause de tout sans être rien de ce dont il est cause, il faut lui enlever toutes ces attributions, et c’est le principe de la théologie négative, qui est supérieure à la positive.

En second lieu, dans les Noms divins, il suit pour examiner les dénominations de Dieu, l’ordre des hypostases que les néoplato-

  1. Lettres 6 et 7 ; édition Migne, 1080 a et b.
  2. Éd. Migne, 588 a.