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CHAPITRE II

COMMENT PENSENT LES PRIMITIFS

Logique et prélogique.

Le logique et le prélogique, dans la mentalité des sociétés inférieures, ne se superposent pas en se séparant l’un de l’autre, comme l’huile et l’eau dans un vase. Ils se pénètrent réciproquement, et le résultat est un mélange dont nous avons grand’peine à laisser indistincts les éléments. Comme, dans notre pensée, l’exigence logique exclut, sans transaction possible, tout ce qui lui est évidemment contraire, nous ne pouvons nous adapter à une mentalité où le logique et le prélogique coexistent, et se font sentir en même temps dans les opérations de l’esprit. La part de prélogique qui subsiste dans nos représentations collectives est trop faible pour nous permettre de restituer un état mental où le prélogique, qui domine, n’exclut pas le logique.

(F. M., pages 112-113.)

La mémoire des primitifs.

La mémoire joue, dans la mentalité prélogique, un rôle plus considérable que dans notre vie mentale, où certaines fonctions qu’elle remplissait lui ont été enlevées et se sont transformées. Notre trésor de pensée sociale se transmet