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provinces. 2° Faire en sorte que l’or et l’argent ne sortent pas du royaume ; ne pas payer tribut à l’étranger. Par conséquent, protéger énergiquement le peu d’industrie qui existe en Prusse, la développer, et n’acheter au dehors, autant que possible, que les matières premières indispensables. 3° Devenir une puissance maritime, quand on aura Dantzig.

Cette politique est conforme aux idées universellement acceptées avant les travaux des économistes de la fin du siècle. Elle semblait tout indiquée pour un pays pauvre, sans grande industrie, et qui, ne pouvant recourir au crédit dans les moments critiques, avait besoin de conserver tout ce qu’il possédait de métaux précieux. Au reste, Frédéric II jugeait avec raison que, pour rendre moins lourdes les charges imposées à son peuple, des mesures d’ordre économique ne suffisaient point. Il croyait nécessaire de gagner le cœur de ses sujets pour compter sur leur dévouement au jour du danger. Il tenait à leur prouver son bon vouloir et sa sollicitude pour leur bien-être ; il se fût reproché de ne pas rendre leur condition plus supportable. Citons, par exemple, la réforme judiciaire, qui fut un véritable bienfait[1]. Tout était à renouveler ; les lois mêmes, la procédure et surtout le personnel. La vénalité de la plupart des juges n’avait d’égale que leur ignorance. Dans la nouvelle Marche et en Prusse, tout le bas personnel judiciaire vivait de vol, selon l’expression d’un rapport officiel ; et quand le justiciable se plaignait, « la canne avait

  1. Voy. Ranke, Œuvres, XXIX, 246.